L’interdit damoclèse d’André Fournelle au Parc D’Arts et de rêves.
Par Liliane Lessard
D’un musée au Parc D'Arts et de rêves
Les photos dans cet article sont de Lise Ducharme, André Fournelle et Liliane Lessard.
Une histoire à raconter…
Regardez attentivement les photos dans cet article, elles témoignent du travail qui a précédé le dévoilement de la sculpture monumentale L’interdit damoclèse, don qu’a fait André Fournelle au parc culturel de D’Arts et de rêves. Mais comment André Fournelle et cette magnifique sculpture se sont-ils retrouvés au Parc ? Laissez-moi vous raconter une belle historie : histoire d’amitié, de talent, de générosité, de bénévolat, d’efforts et de plaisir…
L’amitié et le talent
André Fournelle et Lise Ducharme ont fait connaissance en septembre 2018, lors de l’exposition Champ de Mauve organisée par Muriel Faille*. André avait été invité par Muriel à participer à ce collectif d’artistes et Muriel avait demandé à Lise d’héberger quelques exposants.
Le premier jour de l’exposition, en se promenant sur le site du Champ de Mauve, Lise, attirée par les œuvres d’André, a tout de suite « zoomé » sur son kiosque. Elle s’est présentée, ils ont parlé, se sont découvert des intérêts communs, des atomes crochus, sont allé prendre une bière, ou deux, ont lunché. Bref, disons qu’André a passé plus de temps ce jour-là à causer avec Lise qu’à son kiosque… et c’est aussi simplement que cela que débuta cette belle amitié.
Même si André habitait Montréal et Lise la région suttonaise, ils se parlaient souvent, s’amusaient, riaient, aimaient le fait qu’ils soient tous les deux curieux, de connivence…
Un cadeau
Puis André a offert et dédicacé à Lise un livre qui résume son parcours et présente ses œuvres (Éditeur : DEL BUSSO; date de parution : 04 janvier 2016; ISBN : 9782923792774).
- Fascinée par tout ce qu’elle y découvre, Lise pense tout de suite au Parc D'Arts et de rêves et demande à André s’il ferait don d’une de ses œuvres à ce parc culturel. Faut dire que Lise habite la région et connaît bien D’Arts et de rêves, son histoire, la résidence d’artistes, le parc, les sentiers qui permettent de découvrir des œuvres monumentales sises dans un environnement enchanteur… André est tenté, ne dit pas non.
- Lise communique alors avec Nicole Côté, présidente fondatrice de D'Arts et de rêves, et lui demande si elle aimerait accueillir dans le parc culturel une œuvre d’André Fournelle. Un cadeau d’André Fournelle, un artiste qu’elle connaît évidemment de réputation, ravit Nicole qui affirme d’emblée être plus qu’intéressée !
Printemps 2019, Lise va à Montréal et ramène André. Ils vont marcher dans les sentiers du Parc D'Arts et de rêves et cherchent l’emplacement qui pourrait le mieux accueillir et mettre en valeur une de ses œuvres. À déambuler dans le parc, trois œuvres trottent dans la tête d’André, mais le choix n’est pas encore fixé quoiqu’André sait déjà pertinemment bien que don il y aura. Puis les jours passent et les échanges se multiplient entre André et Lise, le choix se précise, c’est L’interdit damoclèse qui déménagera à Sutton.
Le projet
L’interdit damoclèse avait toujours été exposé dans des galeries ou musées, à l’abri des intempéries, donc n’avait jamais eu à affronter les rigueurs du climat. Alors comment l'adapter pour « vivre » à l'extérieur, la mettre en valeur tout en la protégeant des éléments ?
C’est alors qu’entre en jeu les talents de Lise Ducharme, architecte et artiste. Son concept : faire en sorte qu’on ait l’impression que les trois plaques de L’interdit damoclèse flottent au-dessus de socles.
Lise souhaite intégrer l’œuvre à son environnement, lui donner du corps, la mettre en valeur―car l’ensemble est vaste―en en surélevant les trois éléments, ainsi chacun reposerait sur un socle composé de pierres concassées doté de murets faits de pierres de la région. Œuvre in situ, dans et avec la nature, l’harmonie entre l’art moderne et la nature, parfait exemple de Land Art.
Afin que cet ensemble ne soit pas statique, Lise propose des trottoirs pour que le marcheur puisse, à sa guise, se promener autour des trois éléments de l’œuvre et ainsi l’admirer sous différents angles.
Lise a réussi avec brio à vendre ce concept à André, il n’aura fallu que des rencontres téléphoniques et deux rencontres en présentiel à l’atelier d’André pour que les plans soient finalisés.
Quelques défis :
- Le terrain est dénivelé.
- La finition des différentes composantes est à retoucher puisqu’elle doit résister aux rigueurs du climat québécois, couches de peinture et scellant résistant seront requis.
- Les matériaux… vont nécessiter des sommes, somme toute importantes (en juillet 2021, aucune subvention n’avait encore été accordée pour la réalisation de ce projet, André Fournelle ayant accepté d’en assumer les coûts).
Le concept étant défini, les plans dessinés, les défis identifiés, il est temps de concrétiser le tout.
La réalisation
Voici les grandes étapes de la table à dessin à la mise en place :
- Délimiter la zone.
- Installer l'infrastructure, soit la membrane et le gravier.
- Monter les socles de pierres sous la supervision d'un expert.
- Compléter l'aménagement au sol et au pourtour des trois socles.
- Peinturer et protéger les pièces de métal constituant les trois éléments afin de les rendre étanches.
- Installer les trois éléments de L’interdit damoclèse.
Micheline Bélanger a pensé peinturer une demi-journée et a finalement travailler pendant trois jours. Jean Laberge a aussi collaboré à l’effort peinture, mais on ne l’a malheureusement pas en photo.
Photo-reportage
Il a d’abord fallu repérer l’emplacement, puis ensuite désherber, niveler…
10 palettes de pierres de la région avaient été commandées.
Ron Lauzon avait la responsabilité et l’expérience requises pour opérer la pelle excavatrice.
Nicole Côté et Lise Ducharme au travail.
Cela faisait une grande surface à recouvrir de géotextile.
La pelle excavatrice a beaucoup servi, entre autres pour transporter la roche.
Des piquets délimitaient l’emplacement des socles et des trottoirs.
Les bénévoles ont trimé dur pour sélectionner, placer et agencer les roches sur les socles et les trottoirs.
On voit que cela prend forme, André Fournelle et Ron Lauzon contemplent le travail accompli.
Hélène Laliberté, Mélodie Martin-Couture et Pierre Auger travaillent les pierres au sol pour les trottoirs.
Père et fils, et partenaires au travail, Ron Lauzon et Darryn Grandbois ont tous les deux investi beaucoup de leur temps dans ce projet.
Les socles s’élèvent un peu plus à chaque jour.
Lise Ducharme, une chef de chantier souriante et infatigable.
Des curieux se mêlent à des bénévoles pour constater l’avancement des travaux.
La base du troisième et dernier socle à monter.
Et le muret monte lentement et sûrement.
Pour chaque socle, plusieurs couches de géotextile ont été installées pour tenir le tout en place et s’assurer que les herbes se tiennent au loin. Ron Lauzon en vérifie ici l’installation.
Les trois socles sont presque terminés.
Darryn Grandbois et Anick Cromp travaillent sur le pourtour du socle et Andres Velilla étend la roche.
Maxime Tremblay et André Fournelle installe la base du premier élément de L’interdit damoclèse.
La chef de chantier s’assure que le tout est conforme au plan.
Le travail avance bien. La base du deuxième élément repose sur le socle.
Lise Ducharme « rassemble » les pierres au sol avec du gravier 0-1/2. Poussière de roche et eau cimentent partiellement les pierres.
Ron Lauzon nivelle la surface du troisième socle.
Darryn Grandbois vérifie que les panneaux de styromousse sont bien emboîtés.
Chaque styromousse a été recouvert de géotextile.
André Fournelle et Gilles Lavoie déménagent des composantes de L’interdit damoclèse.
Gilles Lavoie et André Fournelle nettoient les pièces avant de les déposer sur le géotextile; elles sont très très lourdes ces pièces.
Àprès la mise en place de l’œuvre, il faut nettoyer tout autour.
Le dévoilement aura lieu dans moins de 24 heures.
Anick Cromp
Gilles Lavoie
André Fournelle est heureux. Ils ont réalisé toutes les étapes prévues par l’architecte et chef de chantier dans le temps prescrit.
Repos bien mérité.
Une photo de gens heureux de faire partie de l’équipe d’André Fournelle et de Lise Ducharme.
De gauche à droite : Anick Cromp, Darryn Grandbois, Micheline Bélanger, Lise Ducharme, André Fournelle et Ron Lauzon.
La main d’oeuvre
D'Arts et de rêves et Lise ont fait un appel à bénévoles, dont plusieurs amis de Lise, pour concrétiser le concept. André dit que Lise avait le mauvais rôle, que sa tâche n’était pas facile : elle a été la cheffe de chantier, la coach, elle poussait tout en encourageant et sécurisant son monde, elle devait et a su faire preuve de rigueur afin que le concept soit respecté.
Les pauses du midi étaient fort agréables : on cassait la croûte dans la résidence DAR, souvent en goûtant les petits plats d’André, fin cuistot à ses heures.
Tous ceux qui ont donné de leur force, de leurs bras, de leur sueur, de leur bonne humeur, se sont dit heureux de contribuer à la mise en place de L’interdit damoclèse dans le Parc D'Arts et de rêves. Se sont portés volontaires :
- Frédéric Arsenault La Roche Posee : prêt de machinerie
- Pierre Auger : installation des pierres au sol
- Micheline Bélanger : peinture
- Mélodie Martin-Couture : transport du gravier et installation des pierres au sol
- Anick Cromp : installation des pierres au sol
- Darryn Grandbois : montage des socles en pierres
- Jean Laberge : peinture
- Hélène Laliberté : installation des pierres au sol
- Ron Lauzon : transport des pierres, transport du gravier, montage des socles en pierres, nettoyage du chantier
- Gilles Lavoie : transport des pierres, transport des composantes de la sculpture, ménage
- Liliane Lessard : installation du géotextile, ménage, photos
- Zina Mecelis : installation des bornes limites
- Maxime Tremblay : montage des pièces d’acier de la sculpture
- Andres Velilla : préparation du terrain, i.e., nettoyage de la surface au sol, nivelage et marquage au sol
Lise et André ont vraiment travaillé d’arrache-pied durant cette douzaine de jours (21 juin au 2 juillet 2021). Ils étaient des modèles à suivre, une inspiration pour tous ceux et celles qui ont osé braver la chaleur de ces longues et chaudes journées de juin.
Pour conclure…
Lors d’une rencontre qui a suivi le dévoilement de L’interdit damoclèse le 3 juillet 2021 au Parc D'Arts et de rêves, André et Lise se sont rappelé que même si ce projet s’était fait dans l’urgence, il a quand même su rassembler des gens compétents, généreux, des bénévoles vaillants et travaillants, une aide ponctuelle et enthousiaste qui souhaitait et a aimé faire partie de leur équipe.
André résume l’expérience en affirmant être heureux d’avoir pu redonner vie à son œuvre en l’intégrant dans un environnement aussi bucolique. Lise s’est dit très honorée qu’André ait aimé son concept et qu’il ait accepté de travailler avec elle. André a volontiers reconnu et apprécié les talents, la détermination, l’efficacité et l’efficience de son amie architecte. Ce fut un gros et beau projet qui a vite fait de sceller leur amitié.
Vous pouvez admirer L’interdit damoclèse sept jours semaine, du lever au coucher du soleil, au Parc D'Arts et de rêves, 57 Nord, rue Principale. Sutton.
*Muriel Faille : Artiste en arts visuels qui avait d’ailleurs participé au projet de résidence interdisciplinaire Création autour d'une bulle--D'Arts et de rêves - La Fabrique culturelle à D'Arts et de rêves en 2018.
N.B. : La Voix de l’Est a d’ailleurs publié un article sur la réouverture des Studios DAR Sutton et le dévoilement de L’interdit damoclèse, œuvre d’André Fournelle Un nouvel espace créatif au centre-ville de Sutton | Actualités | La Voix de l’Est - Granby (lavoixdelest.ca)